Ce qu’il faut retenir
La Foire commerciale intra-africaine 2025, logée au Parc des expositions des Pins maritimes d’Alger, rassemble plus de deux mille exposants et vise jusqu’à 44 milliards de dollars de transactions. Le Congo, représenté par le ministre d’État Alphonse Claude N’Silou, compte y accroître la visibilité de ses filières exportables.
Sous le haut patronage du président algérien Abdelmadjid Tebboune, l’ouverture a réuni plusieurs chefs d’État. Le discours inaugural a mis en avant l’annulation de 1,5 milliard de dollars de dettes africaines par Alger et a rappelé l’urgence de doper des échanges intra-continentaux encore limités à 15 %.
Alger, nouveau carrefour du commerce africain
Accueillir l’IATF pour la première fois conforte l’Algérie comme plateforme montante entre Maghreb, Sahel et façade méditerranéenne. Les autorités locales comptent transformer les 35 000 visiteurs professionnels attendus en relais d’investissements vers l’industrie, la logistique et la transition énergétique du pays.
Pour Afreximbank, organisatrice de l’événement avec l’Union africaine et le secrétariat de la ZLECAf, la capitale algérienne offre un signal politique fort : faciliter le pont commercial nord-sud sans détour par des hubs extra-continentaux, tout en promouvant des chaînes de valeur régionales.
Les chiffres qui parlent
Avec 3 % seulement du commerce mondial, l’Afrique continue de sous-exploiter son potentiel. Selon Afreximbank, chaque point de pourcentage gagné représenterait près de 70 milliards de dollars de nouvelles recettes annuelles. L’IATF s’érige donc en catalyseur pour booster l’industrialisation locale.
Le fossé est plus criant encore au niveau des institutions financières internationales : 6 % des droits de vote au FMI, 11 % à la Banque mondiale. D’où l’importance, soulignée par Abdelmadjid Tebboune, de créer des instruments endogènes capables de financer ports, énergie et numérique africains.
Le Congo en ordre de marche
Chargé du Commerce, des Approvisionnements et de la Consommation, Alphonse Claude N’Silou est arrivé à Alger avec une délégation d’opérateurs agro-industriels, forestiers et numériques. Objectif : signer des intentions de vente et nouer des joint-ventures pour transformer localement cacao, bois et produits halieutiques.
Reçu par son homologue algérien Kamel Rezig, le ministre d’État a vanté le corridor Pointe-Noire–Brazzaville-Ouesso, présenté comme une future épine dorsale logistique entre l’océan Atlantique et le Sahel. Une fiche de projets assortie d’incitations fiscales a été remise aux partenaires intéressés.
Diplomatie économique et annulation de dettes
L’effacement par Alger de dettes contractées par quatorze pays africains est interprété comme un geste de solidarité mais également comme un levier d’influence. Pour Brazzaville, cette dynamique ouvre la voie à des rééchelonnements bilatéraux avantageux et à un meilleur accès aux financements concessionnels.
« L’Afrique est le continent de l’avenir du monde », a martelé Abdelmadjid Tebboune, rappelant que 60 % des échanges africains se font encore avec l’Europe. Le défi consiste à rediriger une part significative de ces flux vers des voisins immédiats, réduisant coûts et empreinte carbone.
Afreximbank et la mécanique ZLECAf
L’institution basée au Caire table sur des lignes de crédit dédiées aux PME, essentielles pour que la Zone de libre-échange continentale devienne réalité dans les échanges physiques et numériques. Un mécanisme de compensation des paiements en monnaies locales est testé pour abaisser le recours au dollar.
L’ancien président nigérian Olusegun Obasanjo, président consultatif de l’IATF, et l’ex-chef d’État nigérien Mahamadou Issoufou, champion de la ZLECAf, plaident pour que chaque pays valide rapidement les réglementations douanières communes. Sans cela, préviennent-ils, les promesses resteront des slogans.
Scénarios pour la ZLECAf
Premier scénario, optimiste : la foire génère les 44 milliards anticipés et pousse plusieurs corridors ferroviaires à entrer en travaux dès 2026, créant un précédent de succès tangible pour la zone. La croissance régionale pourrait alors gagner un point d’ici 2028.
Scénario médian : les accords signés patinent faute de financements. Les échanges augmentent certes, mais restent cantonnés aux matières premières. Le risque de fragmentation persiste, accentuant les disparités entre pôles côtiers et pays enclavés.
Et après ?
Le gouvernement congolais prévoit un comité de suivi chargé d’évaluer, dans les trois mois, l’exécution des protocoles d’entente conclus à Alger. Une task-force pilotée par l’Agence de promotion des investissements s’appuiera sur des indicateurs précis de volumes et d’emplois créés.
À moyen terme, Brazzaville mise sur la complémentarité entre les routes maritimes de Pointe-Noire, la zone économique spéciale d’Oyo et les marchés des pays sahéliens reconfigurés par la ZLECAf. Le repositionnement sur les chaînes de valeur régionales est vu comme un accélérateur de diversification économique.
