Un rendez-vous stratégique pour les PME congolaises
Vendredi 28 juin 2025, l’hôtel Grand Lancaster de Brazzaville a servi d’agora aux artisans d’une économie congolaise en plein renouvellement. À l’invitation de la Direction départementale des petites et moyennes entreprises, plus de deux cents participants – parlementaires, partenaires techniques et financiers, étudiants et créateurs d’entreprise – ont planché sur un thème aux accents résolument opérationnels : « Comment créer, gérer, financer et développer son entreprise ». La date, qui coïncidait avec la Journée internationale des PME, a conféré à l’événement une dimension symbolique forte, rappelant que le dynamisme entrepreneurial constitue l’un des piliers du Plan national de développement 2022-2026.
Un écosystème en mutation au cœur de la diversification économique
Dans son allocution d’ouverture, Rudy Steph Mpiéré Gouamba, directeur général des PME, a dressé un tableau précis des atouts congolais : potentiel énergétique, accès au marché de la CEMAC et environnement macroéconomique stabilisé. « Notre priorité est de faire du Congo un hub sous-régional de l’initiative privée », a-t-il souligné, saluant les réformes adoptées depuis 2021 pour fluidifier le parcours du créateur d’entreprise. Cette stratégie s’inscrit dans la dynamique impulsée par le chef de l’État, Denis Sassou Nguesso, qui plaide régulièrement pour une diversification des revenus nationaux afin de réduire la dépendance aux hydrocarbures.
Didace Ngafoula-Ganao, directeur départemental des PME de Brazzaville, a ensuite détaillé l’architecture institutionnelle mise en place pour accompagner les jeunes pousses : Centre de formalités des entreprises, Agence de développement des MPE, Fonds d’impulsion, de garantie et d’accompagnement (Figa). L’objectif affiché est clair : faire passer la contribution des PME au PIB de 30 % actuellement à 40 % d’ici 2027, tout en créant des milliers d’emplois durables.
La simplification administrative comme levier de compétitivité
Les intervenants ont rappelé que le délai légal de création d’une société à responsabilité limitée est passé de 15 à 3 jours grâce à la dématérialisation progressive des procédures. « Nous devons aligner nos standards sur ceux des meilleurs classés du Doing Business afin d’attirer le capital international », a martelé M. Tounda, directeur de l’Agence de développement des MPE. Selon les chiffres communiqués, les frais d’immatriculation ont été réduits de 40 % en deux ans, incitant un nombre croissant de jeunes diplômés à formaliser leur activité au lieu de rester dans l’informel, qui représente encore près de 80 % du tissu économique.
Le financement, nerf de la guerre entrepreneuriale
Le volet financier a suscité de vifs échanges. M. Mpara, directeur interdépartemental Brazzaville-Pool au Figa, a précisé que le fonds a déjà garanti plus de 12 milliards de francs CFA de prêts depuis 2023, avec un taux de sinistralité inférieur à 4 %. « Notre mécanisme de partage des risques rassure les banques commerciales et réduit le coût du crédit de deux points en moyenne », a-t-il expliqué. Un banquier présent a confirmé que la titrisation partielle des portefeuilles PME, en cours d’étude avec la Banque centrale, devrait encore fluidifier l’accès aux capitaux.
La Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), représentée par Mme Murielle Koumen, a insisté sur l’importance d’intégrer la protection sociale dans les business plans. En promouvant la couverture des employés dès la phase d’incubation, l’administration souhaite éviter que la précarité n’hypothèque la croissance des jeunes entreprises. Ce message s’inscrit dans la logique du Pacte social renouvelé en 2024, qui vise à bâtir une économie inclusive et résiliente.
Vers une culture entrepreneuriale durable à Brazzaville
Au terme de cinq heures de panels, la satisfaction était palpable. Les participants ont plaidé pour la pérennisation de ce format de master-class, jugé efficace pour rapprocher décideurs publics et secteur privé émergent. « Nous repartons avec des outils concrets et le sentiment que l’administration est prête à nous accompagner », confie Grâce Mbemba, porteuse d’un projet agrotech. En annonçant une deuxième édition dès octobre 2025, la Direction départementale des PME entend capitaliser sur l’élan créé.
Au-delà de la résonance locale, l’initiative brazzavilloise résonne comme un signal adressé aux investisseurs étrangers : le Congo entend accélérer sa transformation économique en créant un climat des affaires à la fois prévisible, incitatif et socialement responsable. Les observateurs notent que cette approche, conjuguant réforme réglementaire et accompagnement financier, pourrait servir de modèle à d’autres capitales africaines désireuses de stimuler leur tissu de PME sans rompre l’équilibre macroéconomique. Reste désormais à convertir la ferveur des salles de conférences en succès tangibles sur les marchés, défi que les autorités assurent aborder avec lucidité et détermination.