Ce qu’il faut retenir
Réunis à Brazzaville, les dirigeants de l’Assa-AC valident un manuel de formation commun et un plan triennal destiné à hisser les standards de sécurité aérienne des six États de la Cémac au niveau exigé par l’OACI.
Dans un contexte régional d’intégration accélérée, la session met aussi l’accent sur l’harmonisation réglementaire, la modernisation des infrastructures et la recherche d’un financement pérenne pour assurer la supervision technique sans dépendre excessivement des budgets nationaux.
Brazzaville au cœur de la sécurité aérienne Cémac
Ouvert le 14 octobre, le neuvième comité de direction s’est tenu sous la présidence de Serge Florent Dzota, directeur général de l’Anac-Congo, figure reconnue pour avoir piloté plusieurs audits de l’OACI ces dernières années.
Les délégués du Cameroun, du Gabon, de Centrafrique, du Tchad et de Guinée équatoriale saluent la dynamique : depuis le 16 août, la Cémac s’est dotée de règlements communs de sécurité aérienne.
Cette avancée offre à Brazzaville, ville connectée par trois nouvelles liaisons régionales en 2024, l’opportunité de s’affirmer comme hub diplomatique et technique de l’aviation civile centre-africaine.
Un plan triennal de formation stratégique
Le comité a approuvé les volumes 1 et 2 du manuel de formation élaboré par l’école de l’Assa-AC, document qui normalise les compétences requises pour les inspecteurs, les experts systèmes et le personnel chargé des enquêtes d’incident.
En parallèle, un plan triennal détaille 120 modules, de la maintenance avionique à la gestion du trafic, répartis entre sessions initiales et perfectionnement continu, avec un démarrage pédagogique prévu en décembre sur le campus flambant neuf de l’agence.
Eugène Apombi, directeur général de l’Assa-AC, insiste sur l’objectif : « Former localement pour limiter la dépendance aux centres européens et réduire les coûts de 40 % tout en respectant les normes OACI », rappelle-t-il devant la presse.
Le chantier comprend aussi un volet e-learning, crucial pour les techniciens des provinces enclavées, ainsi qu’une mutualisation des instructeurs certifiés entre États pour pallier la rareté du capital humain spécialisé.
Harmonisation réglementaire et migrations 2026
Au-delà de la formation, la session anticipe le basculement des lois nationales vers un corpus commun qui entrera progressivement en vigueur dès 2026, avec un appui d’experts espagnols pour la Guinée équatoriale.
Le Cameroun, engagé pilote, a déjà entamé la transition et partage ses retours d’expérience, invitant ses voisins à harmoniser procédures de certification, inspections et reporting pour améliorer la connectivité sous-régionale et attirer davantage de compagnies.
Le futur règlement sur les « événements de sécurité » vise à promouvoir un retour d’information non punitif, indispensable pour atteindre l’objectif zéro accident fixé pour 2030.
Le défi crucial du financement durable
Si la vision est claire, le financement demeure la question la plus sensible : les contributions égalitaires prévues n’arrivent pas toujours dans les délais, compliquant la collecte de la redevance régionale instaurée l’an dernier.
Un protocole de recouvrement harmonisé est en cours de finalisation, sous l’égide de la ministre congolaise Ingrid Olga Ghislaine Ebouka-Babackas, actuelle présidente du comité des ministres, afin de sécuriser le cash-flow de l’agence.
L’Assa-AC envisage aussi une taxe minime sur chaque billet, déjà éprouvée ailleurs en Afrique, sans alourdir excessivement la facture des passagers et des compagnies.
À moyen terme, l’agence ambitionne de diversifier ses ressources via des audits payants, des formations exportées et des partenariats avec les constructeurs pour la certification de nouveaux équipements adaptés aux conditions équatoriales.
Et après ? Cap sur les objectifs internationaux
La feuille de route adoptée à Brazzaville inscrit 2026 comme jalon, 2030 comme horizon : d’ici là, tous les États devront migrer vers le système communautaire, publier leurs différences dans un recueil unique et atteindre 80 % de conformité OACI.
Serge Florent Dzota se veut optimiste : « Notre taux de supervision est passé de 42 % à 55 % en quatre ans. Avec l’école et le soutien politique, nous viserons 70 % dès 2027 ».
Le comité table enfin sur la modernisation progressive des aéroports secondaires, enjeu clé pour desservir les zones minières et forestières, soutenir le tourisme intérieur et fluidifier les couloirs humanitaires en cas de crise.
Une cartographie des infrastructures, produite avec le soutien de la Banque africaine de développement, sera publiée fin année afin d’orienter les investisseurs vers les pistes prioritaires et d’assurer une répartition équilibrée des flux aériens.
Le point juridique confirme par ailleurs que le futur acte additionnel sur la responsabilité civile privilégiera la médiation régionale pour résoudre rapidement les litiges liés aux incidents de piste, réduisant les procédures coûteuses devant les tribunaux étrangers.
En concluant ses travaux, le directeur général de l’Assa-AC a salué « l’engagement constant des chefs d’État, indispensable pour consolider la Cémac des peuples par une mobilité plus sûre et plus fréquente », rappelant l’impact direct sur le commerce intrarégional.
Le chantier reste vaste, mais la méthode se précise : renforcer les compétences, harmoniser les règles, sécuriser les ressources et mesurer les progrès, autant d’étapes qui, selon les acteurs, feront de la sous-région un espace aérien fiable et compétitif.
