Ce qu’il faut retenir
La relance, à La Havane, du mécanisme des commissions mixtes Congo-Cuba dépasse la seule signature d’accords. Elle confirme l’option des deux gouvernements pour une coopération pragmatique, pilotée au plus haut niveau, articulant solidarité politique et opportunités économiques ciblées sur le tourisme, les PME, l’artisanat et l’éducation.
Un dialogue au plus haut niveau
Le 28 novembre, au Palais de la Révolution, le président cubain Miguel Díaz-Canel Bermúdez a reçu Denis Christel Sassou Nguesso, ministre congolais de la Coopération internationale et du partenariat public-privé. Les deux hommes ont mis l’accent sur la « profonde et historique » amitié liant leurs chefs d’État.
En transmettant le message de soutien du président Denis Sassou-Nguesso après l’ouragan Melissa, le ministre congolais a souligné une solidarité « constante » entre Brazzaville et La Havane. Le président cubain a salué cette posture, rappelant que le Congo s’est toujours rangé aux côtés de l’île caraïbe.
La mécanique des commissions mixtes
Les parties se sont surtout félicitées de la réactivation des commissions mixtes, suspendues plusieurs années. Réunies le 27 novembre 2025, elles ont abouti à la signature d’un nouvel accord-cadre de coopération et au renforcement d’un corpus juridique considéré comme indispensable aux investisseurs.
Le mécanisme offre un canal de suivi technique annuel, assorti de feuilles de route mesurables. Selon Brazzaville comme La Havane, cet outil améliore la visibilité des projets et accélère les arbitrages budgétaires internes sans alourdir la dette publique de part et d’autre.
Secteurs cibles à fort potentiel
Quatre accords sectoriels complètent désormais l’architecture: tourisme, petites et moyennes entreprises, artisanat et enseignement primaire. Chacun dispose d’un comité mixte dédié, chargé d’identifier des partenariats concrets et d’accompagner les opérateurs privés qui souhaitent tester ou élargir leur implantation.
Dans le tourisme, La Havane espère capitaliser sur l’expérience du Congo dans l’écotourisme de forêt équatoriale, tandis que Brazzaville envisage d’intégrer le savoir-faire cubain en formation hôtelière. De premières missions exploratoires sont annoncées par les délégations, sans calendrier public pour l’instant.
Le volet PME retient particulièrement l’attention du ministère congolais. Les deux pays misent sur la création d’incubateurs conjoints et l’échange de bonnes pratiques en matière de micro-financement. Les artisans, eux, devraient bénéficier d’un programme de résidences croisées destinées à valoriser les savoirs traditionnels.
Solidarité face aux catastrophes
La mention de l’ouragan Melissa, qui a récemment frappé Cuba, a donné un tour humain aux échanges. Denis Christel Sassou Nguesso a assuré que le Congo se tenait « prêt à apporter un appui concret ». La nature de cette aide sera précisée par les ministères sectoriels.
Côté cubain, le président Díaz-Canel a salué la disponibilité congolaise, rappelant que la coopération médicale de son pays demeure intacte. Les deux dirigeants ont convenu que l’assistance en cas de crise renforçait la crédibilité de leur partenariat au-delà des stricts enjeux économiques.
Le point économique
Les signataires insistent sur un avantage mutuel. Pour Brazzaville, l’expertise cubaine dans la formation et la santé représente un atout non négligeable; pour La Havane, le marché de la CEMAC offre une porte d’entrée vers un espace régional à fort potentiel démographique.
Les quatre nouveaux accords demeurent toutefois de nature intergouvernementale. Leur transformation en projets rentables dépendra de l’implication du secteur privé et d’une circulation fluide d’informations. Les interlocuteurs préparent donc un portail numérique commun pour publier appels d’offres, statistiques et retours d’expérience.
Pour sécuriser les flux financiers, les autorités examinent la possibilité d’employer des instruments de paiement libellés dans une monnaie stable, sans en préciser la nature. L’objectif affiché est de réduire les risques de change et d’assurer un recouvrement rapide des créances commerciales.
Scénarios de montée en puissance
Les diplomates estiment que les échanges commerciaux pourraient doubler à moyen terme si les feuilles de route sont exécutées. Aucun chiffre n’a été divulgué, mais l’élargissement envisagé aux secteurs de l’agro-transformation et des services numériques apparaît déjà dans les notes préparatoires des commissions.
En parallèle, Brazzaville souhaite mutualiser certains programmes de bourses en faveur d’étudiants congolais inscrits à La Havane. Une décision de principe aurait été actée, à confirmer lors de la prochaine session. Les responsables y voient un moyen durable d’ancrer la coopération.
Et après ?
Les deux capitales se sont engagées à réunir la commission de suivi avant la fin du premier semestre 2026. D’ici là, chaque ministère préparera un rapport d’étape, accompagné d’indicateurs de performance. Les diplomates parlent d’une méthode « flexible et réaliste ».
À Brazzaville, les acteurs privés interrogés saluent la dynamique, mais attendent des facilités douanières et une meilleure connectivité aérienne pour concrétiser les promesses. À La Havane, on insiste sur la nécessité d’un calendrier resserré afin de maintenir l’élan politique créé fin novembre.
Dans l’intervalle, les signataires comptent sur la diplomatie parlementaire et la mobilisation des diasporas pour promouvoir les nouveaux dossiers. La réussite de cette relance donnerait un signal positif aux partenaires internationaux, démontrant que Brazzaville et La Havane savent convertir l’amitié historique en projets tangibles.
