La dynamique Fijada et la jeunesse congolaise
A Brazzaville, des voix de plus en plus jeunes portent une ambition numérique inédite. Porté par l’entrepreneur congolais Daniel Biangoud, le Forum international de la jeunesse africaine pour le développement de l’Afrique, Fijada, s’impose désormais comme un catalyseur d’opportunités financières sur les réseaux sociaux.
La présentation officielle du projet, le 27 août, auprès du Conseil consultatif de la jeunesse et du ministère de l’Économie numérique, a confirmé l’intérêt institutionnel pour une initiative qui veut traduire la connectivité en emplois, revenus et affirmation culturelle à l’échelle nationale.
Dialogue État-société civile autour du numérique
Reçu par le secrétaire exécutif Prince Michrist Kaba Mboko, le duo Biangoud-Ebina a plaidé pour une co-construction des programmes de formation, estimant qu’aucune politique publique ne réussit sans relais associatifs capables d’incarner le message auprès des quartiers et des campus.
« Les recommandations issues de Kinshasa nous engagent à partager nos bilans avec les autorités compétentes », rappelle Biangoud, soulignant qu’indépendance associative et partenariat gouvernemental ne s’opposent pas mais se complètent dans la perspective d’une jeunesse unie, active et économiquement autonome.
Le ministre Léon Juste Ibombo, lui, insiste sur la reconnaissance des talents : soutenir les créateurs d’applications, valoriser l’identité congolaise en ligne et encadrer les pratiques afin de transformer l’engouement social en véritable levier de croissance inclusive.
Économie digitale congolaise en mutation
Depuis l’adoption du Plan national de développement 2022-2026, la République du Congo place la transition numérique au cœur de sa diversification économique, misant à la fois sur la modernisation des infrastructures de fibre optique et sur la stimulation d’un écosystème entrepreneurial encore émergent.
Selon l’Autorité de régulation des postes et communications électroniques, plus de 50 % de la population est aujourd’hui connectée, un seuil symbolique qui ouvre la voie à l’économie de la donnée, aux services financiers mobiles et à une présence accrue des PME sur les marchés extérieurs.
Dans ce contexte, le Fijada se positionne comme un couloir de transmission entre aspirations régionales et priorités nationales, conjuguant plaidoyer, expérimentation et réseautage pour que l’innovation ne se limite pas aux capitales mais irrigue également Dolisie, Pointe-Noire ou Owando.
L’héritage du forum de Kinshasa
Organisé à l’occasion de la Journée mondiale de la jeunesse, le sommet de Kinshasa avait réuni des ONG de quinze pays autour du thème « Créer un avenir durable ». La session dédiée à l’économie numérique a donné naissance à une feuille de route continentale.
Cette matrice recommande d’élargir l’accès à la bande passante, de renforcer la protection des données et de soutenir les startups sociales. Elle encourage aussi la création d’opportunités rémunérées pour les créateurs de contenus, segment particulièrement prisé par la jeunesse congolaise.
Jonathan Masuta Lumeya, président du forum, a salué à Brazzaville « l’esprit de restitution », jugeant indispensable que chaque délégation transforme les décibels diplomatiques en dispositifs locaux de formation, de financement et d’accompagnement psychologique des porteurs de projets.
Gouvernance et financement du programme
Sur le plan budgétaire, les promoteurs prévoient un modèle hybride combinant subventions publiques, sponsoring privé et monétisation des contenus en ligne. Cette architecture financière vise à sécuriser la phase pilote sans alourdir la dépense publique, tout en garantissant la gratuité des modules élémentaires.
Un comité d’orientation, regroupant responsables ministériels, représentants du secteur bancaire et acteurs associatifs, doit être installé avant la fin de l’année pour superviser la validation des cursus, la certification des formateurs et l’allocation des microsubventions destinées aux prototypes technologiques.
« Nous travaillerons dans la transparence tout en conservant la souplesse nécessaire à l’innovation », assure José Cyr Ebina, mentor du projet, rappelant que la réussite d’un hub numérique dépend autant de la gouvernance que de la bande passante disponible.
La perspective d’un accompagnement fiscal ciblé, incluant exonérations temporaires de TVA sur les services numériques éducatifs, est également à l’étude au sein du ministère des Finances, selon une source proche du dossier, afin de renforcer l’attractivité pour les investisseurs locaux.
Vers une inclusion digitale responsable
Au-delà de la technologie, les autorités rappellent l’importance de la citoyenneté numérique. Des modules consacrés à la cybersécurité, à l’éthique de l’information et à la protection des données personnelles seront intégrés, afin de prévenir les dérives et de consolider la confiance des utilisateurs.
Le succès du Fijada dépendra également de la connectivité rurale. Le programme s’appuiera sur les pôles communautaires déjà équipés par le projet gouvernemental Congo Télécentres pour réduire la fracture géographique et garantir une égale répartition des bénéfices économiques.
En consolidant la coopération entre gouvernement, société civile et secteur privé, le Congo affirme sa volonté de transformer l’énergie créative de sa jeunesse en moteur de croissance durable, tout en projetant une image d’ouverture régionale conforme aux aspirations panafricaines du numérique.
