Ce qu’il faut retenir
Le dernier rapport du Fonds monétaire international, publié début septembre, revoit la croissance 2025 de l’Angola à 2,1 %, contre 2,4 % auparavant. La contraction attendue du secteur pétrolier et une dette publique encore lourde poussent l’institution à appeler Luanda à une vigilance accrue sur la gestion budgétaire future responsable.
Contexte macroéconomique angolais
Entre 2016 et 2022, l’économie angolaise a oscillé entre récession et faible reprise, minée par la baisse des cours du brut et par la pandémie. La diversification promise, axée sur l’agro-industrie et les minerais, progresse mais reste marginale dans un PIB encore dominé à 35 % par le pétrole.
Le kwanza s’est stabilisé après la libéralisation de 2019, mais la récente volatilité du marché des changes rappelle la dépendance aux recettes pétrolières. Le taux d’inflation, ramené sous les 14 %, demeure toutefois l’un des plus élevés de la région, freinant la demande intérieure déjà fragile et l’investissement privé.
Poids de la dette et vulnérabilités
Selon le ministère des Finances, la dette publique brute représente environ 66 % du PIB, contre plus de 100 % au pic de 2020. Si cette trajectoire descendante est saluée, le FMI souligne que près de la moitié de l’encours reste libellée en devises, exposant à un risque de change.
En 2023, les paiements au titre du service de la dette devraient approcher trois milliards de dollars, soit davantage que les dépenses combinées d’éducation et de santé. Le gouvernement, reconnu pour ses efforts de transparence, négocie un allongement d’échéances avec certains créanciers bilatéraux stratégiques pour lisser la pression.
La Chine demeure le principal prêteur, suivie des marchés obligataires internationaux. Pour l’heure, les observateurs excluent tout défaut, mais l’augmentation des taux mondiaux complexifie les refinancements. Comme le note l’économiste Eugenio Neto, « la marge de manœuvre budgétaire se réduit à chaque hausse du dollar », cette année encore plus.
Mesures gouvernementales et soutien du FMI
Au titre de la Facilité élargie de crédit, Luanda a déjà reçu 4,5 milliards de dollars entre 2018 et 2022. Le FMI, tout en clôturant le programme, poursuit un appui technique ciblé sur la gestion de trésorerie, la réforme fiscale et la surveillance des entreprises publiques nationales stratégiques.
L’exécutif angolais a adopté un nouveau cadre d’endettement basé sur des plafonds annuels et une priorisation des financements concessionnels. « Nous voulons emprunter moins mais mieux », explique la ministre Vera Daves. Les économistes saluent la clarté des règles, gage de prévisibilité pour les marchés et pour les investisseurs internationaux.
Le plan de privatisations, relancé en 2023, doit générer l’équivalent de 1 % du PIB par an de recettes non pétrolières. Les actifs visés incluent banques, cimenteries et parts minoritaires dans Sonangol. Cette démarche, couplée au contrôle des subventions, pourrait ralentir l’accumulation de dette sur le moyen terme durablement.
Scénarios de sortie
Le scénario central du FMI table sur une croissance modérée, soutenue par une légère reprise pétrolière et la montée en puissance du gaz. Toutefois, un choc prolongé sur les cours, associé à des pluies plus faibles dans l’hydroélectricité, ramènerait la hausse du PIB proche de zéro l’année suivante.
Dans un scénario optimiste, la diversification accélérée, portée par les investissements américains dans le lithium et les corridors logistiques transfrontaliers, placerait la croissance au-delà de 4 %. Les ratios d’endettement reculeraient alors plus vite, renforçant la notation crédit et la confiance des bailleurs, ainsi que le coût du capital.
Un troisième scénario, qualifié de stress, combine recul des prix pétroliers et durcissement monétaire mondial. Le service de la dette grimperait à 6 % du PIB, nécessitant des ajustements budgétaires immédiats. Le gouvernement pourrait alors solliciter une nouvelle facilité du FMI pour éviter l’effet boule de neige sur 2025.
Et après pour les investisseurs
Les investisseurs regardent attentivement le spread des eurobonds angolais, actuellement voisin de 700 points de base. Une réduction durable sous 600 points serait interprétée comme un signe de crédibilité retrouvée. La perception de gouvernance, notamment sur les marchés publics, devient ainsi aussi décisive que les indicateurs macroéconomiques classiques.
Le marché intérieur d’obligations en kwanzas, encore étroit, offre pourtant des rendements réels positifs et une source alternative de financement. Selon une note de Standard Bank, l’élargissement de la base d’investisseurs locaux pourrait amortir les chocs externes et réduire la dépendance aux devises fortes sur le plan fiscal.
Le point juridique et économique
Les récentes modifications de la loi sur les finances publiques imposent une publication trimestrielle des engagements contingentés, incluant garanties et partenariats public-privé. Cette obligation, saluée par les cabinets d’audit, réduit l’asymétrie d’information. Elle pourrait devenir un modèle de bonne pratique dans la région CEMAC et au-delà du Golfe.
Parallèlement, la Banque nationale d’Angola finalise un cadre de test de résistance climatique pour les banques. Les premiers résultats, attendus début 2024, orienteront les exigences de fonds propres sectoriels. Un pas supplémentaire vers l’intégration des risques environnementaux dans la gouvernance financière souveraine et privée dans tout le système.