Un cadre réglementaire en pleine maturation institutionnelle
Dans la gauche administrative du bâtiment néo-colonial qui accueille la préfecture de Brazzaville, la convocation adressée aux représentants de partis non encore reconnus a résonné comme un appel à la raison partagée. L’arrêté n°1726 publié le 30 juin 2025 par le ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation, tout en entérinant quarante-deux formations pour l’année électorale à venir, a laissé de côté plusieurs dizaines de demandes soumises à la rigueur de la loi n°20-2017. Ce texte, adopté au terme d’intenses consultations parlementaires, codifie les conditions de création, d’existence et de financement des partis. En ouvrant aujourd’hui une « voie de recours » formelle, l’exécutif réaffirme sa volonté de conjuguer exigence juridique et pluralisme, un équilibre régulièrement salué par les observateurs de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale.
La séance du 12 juillet : pédagogie juridique et écoute active
Samedi, la salle des conférences de la préfecture a accueilli près d’une centaine de délégués, curieux de saisir les ressorts d’une non-inscription jugée par certains comme un camouflet symbolique. Au nom du ministre Raymond Zéphirin Mboulou, le préfet directeur général Bonsang Oko-Letchaud a rappelé que « l’absence dans la liste ne saurait être assimilée à une dissolution ». Autrement dit, les partis restent libres de leurs activités internes, pourvu qu’ils s’attèlent aux régularisations exigées. L’administration s’est engagée à délivrer un accusé de réception aux recours déjà introduits et à publier, le cas échéant, un arrêté rectificatif entérinant la réintégration des structures ayant satisfait aux prescriptions légales.
Tensions verbales et maturité démocratique
Sur le fond, les discussions ont parfois pris des accents passionnés. Maurice Kinoko, chef de file du Mouvement pour la démocratie et le changement, a qualifié la situation de « sanction déguisée ». De son côté, l’ancien ministre Clément Miérassa, porte-voix du Parti social-démocrate congolais, a interrogé la présence, dans la liste officielle, d’entités prétendument éloignées des canons de la loi. Le choc oratoire, poussé à son extrême, s’est incarné dans la joute publique opposant Jean-Jacques Serge Yhomby-Opango au porte-parole du Parti congolais du travail, Parfait Iloki. Néanmoins, l’atmosphère globale est demeurée courtoise, signe qu’une culture de débat contradictoire, mais pacifiée, continue de s’enraciner dans la vie politique nationale.
L’administration comme médiateur impartial
Au terme de la rencontre, les services centraux de l’Intérieur ont rappelé la gradation prévue par le cadre normatif : avertissement, suspension, dissolution. En l’espèce, aucune de ces mesures coercitives n’a été déclenchée. La démarche s’inscrit donc davantage dans la prévention et l’accompagnement que dans la sanction. Plusieurs diplomates présents, sous couvert de discrétion, ont souligné le caractère constructif d’une telle pédagogie administrative, devenue un exemple de « good practice » pour les ministères de l’Intérieur de la sous-région.
Perspectives pour un pluralisme durable
Alors que la campagne pour les échéances de 2026 pointe à l’horizon, l’enjeu pour Brazzaville consiste à maintenir la confiance des acteurs tout en préservant la cohérence du paysage partisan. En encourageant la mise en conformité plutôt que la confrontation, le gouvernement opte pour un réalisme politique compatible avec les standards de la Communauté internationale. À l’issue des échanges, Bonsang Oko-Letchaud a insisté sur la nécessité d’un « dialogue permanent » afin de conjurer toute crispation. Cette main tendue, conjuguée à la célérité promise dans le traitement des dossiers, pourrait, selon plusieurs analystes, redonner souffle à un pluralisme rationnel, propice à la stabilité et au développement économique que le président Denis Sassou Nguesso place au cœur de son agenda.