Ce qu’il faut retenir
La République centrafricaine aborde l’échéance électorale de 2025 dans un climat mêlant attentes sociales et crispations politiques. Anicet Georges Dologuélé apparaît comme la principale alternative, misant sur son profil d’économiste et sa réputation de modération pour séduire un électorat lassé des violences.
Son programme s’articule autour de trois priorités : assainir les finances publiques, relancer la production agricole et industrielle, et rouvrir un espace politique inclusif. L’enjeu est double : rétablir la confiance des bailleurs tout en offrant aux Centrafricains une perspective de stabilité durable.
Contexte politique et sécuritaire
Depuis 2016, Faustin-Archange Touadéra gouverne un pays toujours fractionné par des groupes armés. Malgré la présence de partenaires internationaux, l’État peine à étendre son autorité en dehors de Bangui, et la population reste confrontée à l’insécurité, à la pauvreté et à la hausse du coût de la vie.
Le second mandat de Touadéra a été marqué par l’adoption contestée d’une nouvelle Constitution et par un débat récurrent sur l’empreinte d’acteurs extérieurs dans la fourniture de sécurité. Ces facteurs nourrissent le sentiment d’une gouvernance autoritaire et renforcent l’attrait pour une alternance institutionnelle.
Un économiste aguerri face aux défis centrafricains
Ancien Premier ministre et ex-président de la Banque de développement des États de l’Afrique centrale, Dologuélé revendique une expertise rare : maîtrise budgétaire, négociation avec les partenaires techniques et financiers, et vision régionale des corridors commerciaux qui pourraient dynamiser l’agro-industrie locale.
« Il faut transformer nos ressources en valeur ajoutée et en emplois », répète l’intéressé lors de ses déplacements en province, insistant sur des projets de chaînes de valeur locales pour le coton, le café ou le bois, afin de réduire la dépendance aux importations alimentaires.
L’épreuve de la nationalité et l’État de droit
Une décision de justice annulant son certificat de nationalité, après sa renonciation à la nationalité française, a momentanément fragilisé sa candidature. Dologuélé a choisi la voie légale, saisissant le Conseil constitutionnel afin de défendre le principe d’égalité devant la loi.
Ce recours a renforcé son image d’homme d’État attaché aux institutions. « Personne ne doit être privé arbitrairement de sa citoyenneté », a-t-il déclaré, rappelant la nécessité de consolider la confiance dans un appareil judiciaire régulièrement critiqué pour sa politisation.
Le jeu des alliances avant le scrutin
À la tête de l’Union pour le renouveau centrafricain, Dologuélé fédère désormais plusieurs figures de l’opposition. Jean-Serge Bokassa s’est rangé derrière lui, tandis que des discussions avancées se poursuivent avec le Kwa na Kwa de François Bozizé et le MLPC de Martin Ziguélé.
Cette coalition vise surtout les préfectures d’Ouham, de Nana-Grébizi et de la Lobaye, zones à fort potentiel électoral. Les équipes de campagne affûtent déjà leur maillage local pour sécuriser le vote rural, jugé déterminant depuis la réforme du mode de scrutin.
Scénarios pour décembre 2025
Plusieurs chemins restent ouverts. Un scrutin transparent où les principaux candidats concourent pourrait déboucher sur une alternance pacifique, si Dologuélé transforme son avance dans les sondages en victoire nette dès le premier tour.
À l’inverse, une exclusion juridique, des violences préélectorales ou des retards logistiques risqueraient de fragiliser la légitimité du processus. La mobilisation de la communauté internationale, notamment la CEEAC et l’ONU, sera cruciale pour garantir la neutralité de l’administration électorale.
Et après ?
Si l’alternance se confirme, les Centrafricains devront juger rapidement sur pièce la capacité de la nouvelle équipe à sécuriser les axes routiers, redresser les comptes publics et réconcilier les forces politiques régionales. Le pari économique est ambitieux, mais les attentes populaires le sont tout autant.
En cas de statu quo, la contestation pourrait se déplacer vers la rue, avec le risque connu d’un cycle répressif. Dans ce contexte, la stature conciliatrice de Dologuélé et la solidité de ses alliances représentent, pour une frange grandissante de l’opinion, un chemin praticable vers la décrispation durable.
