Un filet sanitaire aux résonances géopolitiques
À Kinkala, chef-lieu du Pool, la sobre cérémonie du 2 août a pris des accents stratégiques. L’annonce, par le préfet Jules Mounkala Tchoumou, de la distribution gratuite de moustiquaires imprégnées à longue durée d’action cristallise la volonté nationale de contenir un paludisme qui demeure, selon l’Organisation mondiale de la santé, première cause de morbidité dans la sous-région. Au-delà de la santé publique, l’initiative s’inscrit dans l’ambition du gouvernement de densifier la présence de l’État sur l’ensemble du territoire, pivot d’une stabilité politique souvent citée comme prérequis au développement économique.
Traçabilité numérique : une logistique maîtrisée
Le logisticien départemental Cyr Edgard Mbadi Moumpouya met en avant un dispositif de code-barres scanné via téléphone portable, destiné à suivre chaque moustiquaire depuis l’entrepôt jusqu’au foyer bénéficiaire. Cette méthode, testée à petite échelle lors de la campagne pilote du 28 juin dans le Djoué-Léfini, répond au double impératif de transparence et de rigueur budgétaire, deux critères scrutés par les partenaires techniques et financiers. L’ingénierie logistique, souvent invisible, scelle la crédibilité de l’opération, limitant les risques de détournement et alimentant un capital-confiance essentiel à l’obtention de futurs financements multilatéraux.
Conscientisation et appropriation communautaire
Le succès d’une moustiquaire se joue moins dans le ruban inaugural que dans la chambre à coucher. D’où la pédagogie déployée par les agents de terrain : aérer la toile vingt-quatre heures, proscrire l’eau de javel, bannir les usages parallèles. « Nous serons des bons éducateurs », promet Mbadi Moumpouya. Dans une région où la rumeur peut voyager plus vite qu’un moustique, la communication interpersonnelle supplée parfois les affiches officielles. Elle renforce, au passage, les liens entre autorités locales et populations, ciment d’une gouvernance de proximité souhaitée par le président Denis Sassou Nguesso.
Hygiène publique : la symbolique de l’hôpital général
Parallèlement, la vaste opération de salubrité menée autour de l’hôpital général de Kinkala, sous l’égide du préfet et de la maire Edwige Ndebeka Biyengui, rappelle que la lutte antipaludique dépasse le simple don matériel. Assainir l’environnement, désherber les abords et valoriser un établissement inauguré lors de la municipalisation accélérée forment un continuum sanitaire. Ce geste collectif matérialise la circulaire gouvernementale instituant la journée « Villes, villages et habitations propres », ancrant la prévention dans un rituel citoyen partagé.
Vers une couverture nationale graduelle
La phase actuelle concerne six départements, de la Likouala aux Plateaux. L’échelonnement répond à une logique de capacité d’absorption et de disponibilité des stocks, sans négliger la coopération déjà engagée avec la République démocratique du Congo voisine pour harmoniser les calendriers de distribution le long du fleuve Congo. À moyen terme, le ministère de la Santé table sur une réduction sensible de l’incidence palustre, condition pour libérer des ressources et accélérer l’agenda de la Couverture santé universelle, pilier du Plan national de développement 2022-2026.
