L’enjeu d’une médiation ecclésiastique
Les Pères spirituels du Congo, en l’occurrence la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et l’Église du Christ au Congo (ECC), ont dernièrement fait trembler l’asphalte diplomatique de Kinshasa en dévoilant un ambitieux projet de pacification nationale. Présenté au Président Félix-Antoine Tshisekedi le 21 juin 2025, ce projet découle de consultations tant internes qu’internationales. Leur probité ecclésiale semble vouloir transcender les crises qui entravent le chemin de la RDC vers la tranquillité politique et sociale.
Une entrevue significative à la présidence
Réunis pour un dialogue d’environ deux heures à la Cité de l’Union africaine, symbolique siège de la présidence congolaise, Mgr Donatien Nshole et le pasteur André Bokondoa ont été reçus par le Président. Ce dernier a montré une ouverture remarquable, engageant une discussion révélatrice avec ses interlocuteurs ecclésiastiques. Au terme de l’entretien, une perspective de collaboration a été esquissée par le Chef de l’État, attestant d’une possible synergie avec les confessions religieuses pour concrétiser ce pacte social axé sur la paix et le cohabitat harmonieux dans la sous-région des Grands Lacs.
Un contexte de tensions persistantes et d’espérances
Le dessein des Églises ne s’inscrit pas en marge des réalités troublantes du territoire congolais. Depuis le début de l’année 2025, la RDC est en proie à des violences alimentées par le groupe rebelle M23, soutenu par le Rwanda. Dans cet environnement de défiance, les églises ont intensifié leurs démarches diplomatiques, sollicitant une attention internationale à l’Union africaine, au Vatican, et aux partenaires en Europe et Amérique. Ainsi, leur initiative œcuménique se veut un pansement prompt à apaiser les plaies d’un pays fragilisé par les querelles et l’adversité.
Entre défiance gouvernementale et soutien de l’opposition
Toutefois, cette démarche pacifiste n’est pas sans susciter des remous. Du côté du gouvernement, une prudence à peine voilée subsiste vis-à-vis de la démarche religieuse, perçue par certains comme un pas indû dans l’arène politique. Par contre, l’opposition voit d’un bon œil cette intervention. Des voix comme celle de Martin Fayulu ont applaudi cette tentative proactive de médiation, argumentant qu’elle pourrait servir de contrepoids aux tentations autocratiques du régime en place.
Un chemin semé d’embûches pour l’unité nationale
La réussite de ce dispositif dépendra inéluctablement de la capacité des églises à rassembler une vaste palette d’acteurs : des partis politiques à la société civile en passant par les jeunes et la diaspora. Comme le souligne le pasteur Éric Nsenga, il s’agit d’une quête de « refondation morale et sociale », une condition sine qua non pour offrir un avenir serein à la RDC. Toutefois, l’implication des autorités, historiquement sur leurs gardes face à l’influence des églises, demeure cruciale.
Le rôle pérenne des églises dans la sphère publique
Depuis des décennies, l’Église en RDC ne fait pas office de simple témoin des convulsions sociopolitiques du pays. Sa légitimité, qui traverse campagnes et conflits, est un pilier pour nombre de Congolais. En entérinant la mise en place d’une commission commune, le Président Tshisekedi semble reconnaître ce capital de confiance. Mais l’horizon de cette collaboration n’est pas encore exempt d’ombres. Il s’agira pour les belligérants de démontrer que ce pacte social ne relève pas du vœu pieux, mais bien d’une initiative tangible pour rétablir une paix durable.