Ce qu’il faut retenir
En une heure d’échange, Vincent Dossou Sodjinou et le président du Sénat ont posé les bases d’un partenariat sanitaire mis à jour : budgets mieux calibrés, vigilance sur le choléra et la mpox, anticipation d’Ebola, et désir d’ancrer la santé au cœur de chaque politique publique.
Un partenariat stratégique au cœur du Sénat
Dans l’hémicycle de Brazzaville, le représentant de l’OMS a salué « la voix structurante du Sénat » dans la mise en œuvre des orientations du gouvernement. Le dialogue, jugé « franc et pragmatique », cherche à s’appuyer sur la stabilité institutionnelle pour booster la gouvernance sanitaire.
Le président de la chambre haute a rappelé que « le Parlement accompagne les choix du chef de l’État pour garantir le bien-être des populations ». L’OMS voit dans cette posture un levier pour déplacer le débat sanitaire du seul exécutif vers l’ensemble du tissu politique.
Contexte : un système de santé en mutation
Depuis cinq ans, le Congo-Brazzaville a inauguré ou rénové plus de vingt structures hospitalières, consolidant un réseau considéré par l’OMS comme « prometteur ». Le défi se situe désormais à la base de la pyramide, où les centres de santé intégrés restent inégalement équipés.
Les urgences récentes — flambée de choléra dans le Pool, poches de mpox dans la Cuvette et menace Ebola venue de la RDC — rappellent la nécessité d’avoir des sentinelles communautaires réactives. Le dialogue Sénat-OMS s’inscrit dans cette urgence concrète.
Des priorités sanitaires partagées
Premier point d’alignement : la lutte contre le choléra. Le Sénat s’est engagé à soutenir des crédits pour l’eau potable et la surveillance épidémiologique ciblée autour des points de captage. L’OMS fournira des kits rapides et des formations au personnel local.
Deuxième priorité : la variole simienne, rebaptisée mpox. Le pays n’affiche que des cas sporadiques, mais le représentant onusien insiste sur la préparation de laboratoires de niveau 3. Les sénateurs veulent inscrire la dotation en réactifs dans la prochaine loi de finances.
Troisième axe : l’« Ebola readiness ». Les corridors fluviaux reliant Kinshasa à Brazzaville facilitent la mobilité et le risque viral. Des exercices transfrontaliers conjoints avec la RDC sont envisagés, tandis que le Sénat promet un cadre légal pour la gestion des stocks stratégiques de vaccins.
Le financement comme catalyseur
Au-delà des urgences, l’OMS plaide pour une augmentation progressive du budget santé jusqu’à 15 % des dépenses publiques, alignant le Congo sur la cible d’Abuja. Les sénateurs reconnaissent l’enjeu, mais soulignent la nécessité de concilier discipline macro-budgétaire et investissements visibles.
« Chaque franc voté doit être traçable depuis le Trésor jusqu’au poste de santé », a martelé un élu du Niari. L’agence onusienne proposera un tableau de bord budgétaire numérique afin de mesurer l’effectivité des crédits et réassurer les partenaires techniques.
Scénarios de coopération renforcée
Scénario 1 : poursuite de la dynamique actuelle, avec un appui OMS ciblé sur la surveillance des maladies. Scénario 2 : passage à une coopération intégrée, incluant la modernisation des centres de santé, la digitalisation des dossiers patients et l’introduction de la télé-expertise.
Scénario 3, jugé ambitieux : lancer un fonds commun Sénat-OMS-partenaires bilatéraux pour financer la maintenance hospitalière et la recherche clinique locale. Chaque option dépendra de la capacité à mobiliser des co-financements privés, notamment via les zones économiques spéciales.
Vers une approche « Santé dans toutes les politiques »
Le représentant de l’OMS a insisté sur cette approche intersectorielle. Logement salubre, routes praticables, écoles dotées de latrines et climat d’affaires favorable à la pharmacie locale : autant de politiques non sanitaires qui influent sur la morbidité.
Le Sénat envisage d’instituer un contrôle d’impact sanitaire pour chaque projet de loi. « Il ne s’agit pas de freiner les initiatives, mais de garantir qu’aucune ne détériore la qualité de vie », souligne un membre de la commission affaires sociales. L’OMS offre son expertise méthodologique.
Pour matérialiser cette démarche, un guide législatif, co-signé par les deux institutions, sera diffusé aux ministères. Objectif : harmoniser vocabulaire, indicateurs et procédures afin que la santé devienne un critère commun, de l’agriculture au numérique.
Et après ? Cap sur les communautés
La prochaine étape porte sur la proximité. Le Sénat veut accélérer la réhabilitation de 410 centres de santé intégrés, cible fixée par le gouvernement à l’horizon 2025. L’OMS propose d’y adosser des laboratoires polyvalents et un système de motos ambulances adaptés aux pistes rurales.
Les comités de village, déjà impliqués dans la sensibilisation au paludisme, seront outillés pour relayer les alertes choléra et mpox. En parallèle, une campagne radio multilingue rappellera les gestes barrières et les lieux de prise en charge gratuits.
En misant sur la synergie politique, financière et communautaire, le Congo espère consolider les acquis et répondre, avec sérénité, aux défis sanitaires qui jalonnent la sous-région. L’OMS, elle, voit dans cette ambition « un modèle de coopération vertueuse au cœur du bassin du Congo ».