Ce qu’il faut retenir
Annoncée comme une étape-clé du calendrier institutionnel, la session inaugurale 2025-2029 du Conseil économique, social et environnemental s’est ouverte à Brazzaville sous le regard du Premier ministre Anatole Collinet Makosso et d’une large délégation gouvernementale et diplomatique.
Emilienne Raoul, reconduite à la présidence, a lancé les travaux avec une feuille de route résolument axée sur l’inclusion, la cohésion et le dialogue social, valeurs portées par le chef de l’État Denis Sassou Nguesso et reprises par les autorités dans la stratégie nationale de développement.
Au programme de cette première plénière figurent l’adoption du règlement intérieur, du plan stratégique quinquennal et la mise en place de commissions thématiques appelées à éclairer les politiques publiques sur l’emploi, la transition verte, la compétitivité des entreprises et la justice sociale.
Contexte institutionnel et économique
Instauré par la Constitution, le CESE sert de passerelle entre l’État et la société civile organisée en regroupant chambres consulaires, syndicats, experts, ONG, et confessions religieuses, afin de fournir des avis motivés sur les projets de loi et d’anticiper les tensions sociales.
Depuis la précédente mandature, l’institution a émis une cinquantaine de recommandations dont plusieurs ont nourri le Programme national de développement 2022-2026, notamment le volet diversification économique et l’initiative « santé-forêts » saluée par les partenaires techniques.
La nouvelle session intervient alors que les indicateurs macroéconomiques montrent un rebond, avec une croissance attendue autour de 4 %, porté par le BTP, l’agro-industrie et les services, autant de secteurs appelés à être examinés par les commissions économiques du Conseil.
La parité au cœur du débat
Dans son discours, Emilienne Raoul a mis en lumière la question de la représentativité féminine inscrite dans la loi organique qui fixe au moins 50 % de femmes parmi les conseillers, rappelant que ce seuil demeure un engagement constant du président de la République.
Le décret de mai 2025 fait toutefois descendre la proportion féminine à 48 %. La présidente juge cette variation conjoncturelle mais plaide pour un réajustement dès les prochaines nominations afin de préserver le rôle moteur des femmes dans la consolidation de la cohésion nationale.
À travers son rappel historique sur l’émancipation, elle souligne que le Congo a toujours été pionnier dans l’autonomisation des femmes, citant l’accès précoce des Congolaises aux responsabilités politiques et la récente Stratégie nationale genre appuyée par ONU Femmes.
Le défi générationnel
Au-delà de la parité, le rajeunissement de l’assemblée constitue un autre axe stratégique. Les membres âgés de 30 à 40 ans n’atteignent pas 15 %, alors que le pays compte plus de 60 % de population de moins de 25 ans.
Pour inverser la tendance, Emilienne Raoul propose un quota jeune dans chaque catégorie socio-professionnelle ainsi qu’un programme de mentorat avec les chambres de commerce, les universités et les start-ups de la Tech, secteur que soutient déjà le Plan national pour l’économie numérique.
Le Premier ministre s’est montré réceptif, soulignant que l’exécutif prépare un guichet unique pour l’insertion professionnelle et un fonds d’impact dédié aux initiatives vertes pilotées par les jeunes, dispositifs qui pourraient bénéficier d’un avis consultatif accéléré du CESE.
Perspectives et calendrier
Dès novembre, les commissions entreront en séances hebdomadaires pour produire une feuille de route sectorielle alignée sur les engagements climatiques du Congo au sein de la Commission climat du Bassin du Congo et sur les objectifs de l’Agenda 2063 de l’Union africaine.
Un premier rapport d’évaluation est attendu à la conférence économique nationale prévue mi-2026; il devra mesurer l’impact des recommandations du CESE sur la mobilisation des ressources internes, la gouvernance environnementale et l’effectivité des filets sociaux développés par le gouvernement.
À moyen terme, la présidente entend institutionnaliser un « baromètre de la cohésion » inspiré de l’expérience sénégalaise, combinant indicateurs de confiance citoyenne, satisfaction des entreprises et perception de la qualité des services publics afin d’ancrer la culture de résultat dans l’administration.
Et après ?
La session inaugurale confirme ainsi la vocation centrale du CESE, catalyseur de dialogue pacifique et de développement partagé. Son positionnement, salué par les partenaires internationaux, renforce la crédibilité réformatrice du Congo dans un contexte régional marqué par des attentes fortes en matière d’inclusion.
Tandis que s’ouvre cette mandature, observateurs et investisseurs restent attentifs aux livrables du Conseil. La capacité des conseillers à concilier aspirations citoyennes et impératifs budgétaires sera, selon les analystes, un indicateur majeur de la solidité du pacte social congolais.
Le point juridique et économique
Sur le plan normatif, la loi organique adopté en 2021 confère au CESE la faculté d’auto-saisine sur les projets de textes ayant un impact socio-économique significatif. Cette disposition, encore peu utilisée, devrait amplifier la réactivité de l’institution aux signaux du terrain.
Parallèlement, le décret fixant l’indemnité des conseillers introduit un mécanisme d’évaluation individuelle indexé sur la participation effective aux débats et la qualité des propositions. Les observateurs y voient un levier moderne pour encourager l’efficacité et la reddition de comptes au sein des organes consultatifs publics.
