Brazzaville mise sur la force du slam
Du 8 au 10 décembre 2025, l’Institut Bana Moyi, niché rue Soweto dans le quartier Ex-Télé, se transformera en scène ouverte aux mots qui claquent. Sous l’impulsion du Centre d’Actions pour le Développement, Brazzaville accueillera la première édition du Festival Slam pour les Droits Humains.
Lauréat du Prix de l’Innovation Nelson Mandela – Graça Machel, le projet attire déjà la curiosité régionale. « Notre ambition est simple : montrer que la poésie orale peut devenir un outil d’influence positive », confie Guerschom Gombouang, alias Guer2mo, responsable campagnes au CAD et directeur artistique du festival.
Le choix de la date n’est pas anodin. La clôture le 10 décembre coïncidera avec la Journée internationale des droits de l’homme, inscrivant l’initiative dans le calendrier mondial des mobilisations citoyennes sans opposer culture et institutions nationales.
Un programme artistique rythmé
Trois soirées se succéderont sous les palmiers de Bana Moyi. La première mettra en scène la deuxième édition du concours « Voix Libre ». Le lauréat repartira avec un enregistrement studio, un clip vidéo, un soutien médiatique et le trophée officiel, tremplin rarement accessible aux jeunes artistes de la capitale.
Les deux autres nuits offriront des spectacles réunissant slameurs confirmés et révélations de Pointe-Noire, Owando ou Dolisie. Les têtes d’affiche, Guer2mo et Black-Panther en tête, partageront le micro avec des voix émergentes, créant une passerelle intergénérationnelle qui nourrit déjà l’effervescence sur les réseaux sociaux.
L’organisation promet un dispositif scénique de qualité professionnelle, éclairage soigné et sonorisation calibrée, afin de valoriser la richesse linguistique des textes, parfois déclamés en lingala, en kituba ou en français. Le public devrait ainsi voyager entre rythmes urbains et traditions orales congolaises.
Village associatif au cœur de l’engagement
Au-delà de la scène, le festival s’étend dans la cour de l’Institut sous forme de village associatif. Douze organisations disposeront chacune d’un stand pour présenter leurs actions, de la promotion de la santé communautaire aux initiatives écologiques en zone périurbaine.
Cet espace vise à rapprocher la société civile d’un public souvent éloigné des structures formelles. « Nous voulons que les visiteurs ressortent avec une adresse, un contact, une idée pour agir », souligne Clémentine Ndinga, coordinatrice logistique du CAD.
En journée, concerts improvisés et performances de rue ponctueront ce marché citoyen, créant une atmosphère festive sans négliger la pédagogie. Les organisateurs insistent sur l’accès gratuit du festival, afin de garantir la mixité sociale et générationnelle sur tout le parcours.
Former la relève citoyenne
Les ateliers constituent l’autre pilier du programme. Des séances d’initiation au slam dévoileront les bases de l’écriture rythmée, tandis que des panels aborderont l’égalité de genre, la participation électorale ou la justice sociale, en lien avec les priorités nationales de développement.
Des dizaines d’élèves des lycées environnants sont attendus. « Nous misons sur la jeunesse, parce que c’est elle qui portera les grands chantiers de demain », insiste Guer2mo. Les sessions interactives favoriseront le dialogue, chacun étant invité à transformer idées en vers, vers en actions.
Le festival prévoit également un atelier médiation numérique pour aider les associations à amplifier leurs messages sur les plateformes sociales, prolongeant virtuellement l’impact des trois journées.
Perspectives au-delà du festival
Pour le CAD, cette première édition n’est qu’une étape. L’équipe travaille déjà à un réseau sous-régional de festivals de slam citoyen, avec des relais envisagés à Libreville ou Yaoundé, afin de renforcer la coopération culturelle au sein de la CEMAC.
Le partenariat avec l’Institut Bana Moyi pourrait évoluer vers une résidence permanente d’artistes, transformant le site en laboratoire d’innovation sociale. Des mécènes locaux, sensibles au rayonnement international du Prix Nelson Mandela, étudient des formes de soutien à moyen terme.
En capitalisant sur l’enthousiasme du public et la visibilité des réseaux, Brazzaville espère inscrire durablement le slam dans son agenda culturel. À l’heure où la créativité devient un vecteur d’attractivité économique, ce rendez-vous promet de combiner passion artistique et conscience citoyenne sans jamais dissocier art et progrès sociétal.
