Escalade des intrusions nocturnes
Dans la nuit du 20 août, des inconnus se sont introduits au CEG Pierre Lountala, à Dolisie, fracturant portes et armoires avant de tout chambouler sans emporter la moindre feuille. L’épisode, déroutant, s’ajoute à une série d’intrusions similaires dans la cité ferroviaire.
Le commissaire urbain, surpris par l’absence de butin, évoque une possible tentative d’intimidation. « Nous n’excluons aucune hypothèse, y compris celle d’un repérage préparatoire », confie-t-il, rappelant que deux autres collèges, Hammar et Unité, avaient été visités la semaine précédente.
Ces incidents posent la question cruciale de la protection des infrastructures éducatives, pilier du développement humain inscrit dans la stratégie nationale de l’éducation à l’horizon 2025, défendue par le ministère de l’Enseignement primaire, secondaire et de l’Alphabétisation.
Cartographie des écoles ciblées
Selon les services déconcentrés de la Sécurité publique, six établissements de Dolisie ont signalé des effractions depuis janvier. La plupart se situent dans des zones périphériques où la densité démographique progresse plus vite que la couverture policière et l’éclairage public.
Le CEG Pierre Lountala illustre cette vulnérabilité : absence de clôture continue, bâtiments anciens, surveillance limitée à un gardien non armé. Les associations de parents d’élèves plaident pour des patrouilles nocturnes accrues et l’installation de lampadaires solaires autour des salles spécialisées.
Pourtant, des écoles clôturées comme le lycée de la Révolution ont également subi des incursions, signe que le phénomène dépasse la simple question d’enceinte. Les malfaiteurs semblent rechercher des documents administratifs plutôt qu’un butin monétaire, nourrissant spéculations dans la société civile.
Réponse institutionnelle et cadre légal
Face à l’inquiétude, le gouvernement a dépêché à Dolisie une mission conjointe Intérieur-Éducation chargée d’évaluer les besoins de sécurisation. Les premiers constats ont été remis au ministre Raymond Zéphirin Mboulou pour une intégration rapide au Plan national de sécurité intérieure.
Le cadre légal prévoit déjà, depuis le décret de 2019, la vidéosurveillance facultative dans les enceintes scolaires publiques. Le ministère travaille à un partenariat public-privé pour mutualiser les coûts, inspiré du modèle testé à Oyo, jugé concluant par les autorités locales.
Des fonds dérivés de la taxe sur les terminaux télécoms pourraient abonder un futur programme d’alarme connectée. « Nous devons protéger le capital humain dès l’école », a déclaré la ministre de l’Économie numérique, affirmant que la connectivité rurale offrira également des solutions dissuasives.
Impact social et perceptions locales
La série de vols a ravivé des souvenirs du mouvement d’élèves de 2014, né à la suite de pertes de matériels pédagogiques. Cette fois, la communauté éducative adopte une posture de dialogue, convaincue que la peur ne doit pas entraver l’assiduité.
À la radio régionale, le maire de Dolisie a insisté sur la responsabilité collective : « Chaque quartier doit redevenir un gardien vigilant de ses écoles. » Son propos rejoint les campagnes de sensibilisation menées par le Conseil départemental de la jeunesse dans les marchés.
Les parents interrogés redoutent aussi un impact psychologique sur les plus jeunes. Toutefois, les psychologues scolaires rappellent que la reprise rapide des cours et la transparence des administrations limitent le risque de traumatisme, à condition de maintenir un discours apaisant dans les foyers.
Enjeux sécuritaires et diplomatie régionale
Dans la sous-région, les atteintes aux établissements d’enseignement préoccupent aussi le Comité des Nations unies pour la paix en Afrique centrale. Brazzaville, en tant que siège, promeut un échange de bonnes pratiques afin de protéger ce qu’elle appelle « les sanctuaires du savoir ».
Le ministre congolais des Affaires étrangères, Jean-Claude Gakosso, a récemment plaidé devant ses pairs de la CEEAC pour un protocole d’alerte transfrontalière couvrant les incidents scolaires, arguant que la mobilité des groupes criminels exige une réponse concertée et non strictement nationale.
Des bailleurs tels que l’UNICEF et l’AFD explorent déjà la possibilité d’intégrer un volet sécuritaire à leurs programmes d’appui scolaires. L’option, encore à l’étude, viserait le financement de systèmes d’alarme sobres en énergie et la formation de brigades d’élèves sentinelles.
Perspectives et recommandations
Les experts sécuritaires recommandent des solutions graduelles : clôture rationalisée, éclairage intelligent, gardiennage communautaire et archivage numérique pour limiter l’attrait des documents physiques. Ces mesures, soulignent-ils, coûtent moins qu’une reconstruction et s’inscrivent dans la vision gouvernementale d’une école résiliente.
L’organisation de comités mixtes parents-forces de l’ordre, déjà opérationnelle à Pointe-Noire, pourrait être étendue à Dolisie. Cette initiative favorise l’échange d’informations et renforce la confiance entre population et police, condition indispensable pour prévenir les actes préparatoires à des intrusions.
À l’approche de la rentrée, l’enjeu est double : rassurer les familles et préserver l’élan éducatif soutenu par l’État. Les travaux d’urgence débuteront en septembre, tandis qu’un audit national dressera, d’ici décembre, la cartographie complète des besoins sécuritaires des écoles congolaises.
Pour les partenaires internationaux, la sécurisation des écoles congolaises constitue aussi un indicateur clé de stabilité. Un bilan positif renforcerait l’attractivité du pays auprès des investisseurs du numérique éducatif, domaine que la diplomatie économique congolaise promeut lors des forums africains et francophones.
