Ce qu’il faut retenir
Au cœur de Brazzaville, le programme « Connect Diaspora » vient d’être présenté au Conseil consultatif de la société civile et des ONG. Pensé par le FORIM, il ambitionne de canaliser les savoir-faire et financements de la diaspora congolaise de France vers l’agenda national de développement.
Le secrétaire permanent Germain Céphas Ewangui salue une démarche qui s’accorde avec la feuille de route gouvernementale, axée sur la diversification économique, l’innovation sociale et l’inclusion des Congolais de l’étranger dans les politiques publiques.
Un pont entre Paris et Brazzaville
Depuis les années 1990, les envois de fonds de la diaspora représentent une source majeure de devises pour le Congo-Brazzaville. Désormais, Connect Diaspora veut aller plus loin : orienter ces ressources vers des projets identifiés en concertation avec les ministères sectoriels et les collectivités territoriales.
Pour Alioune Sy, président du FORIM, la valeur ajoutée réside dans la formalisation des échanges. « Nous proposons un cadre institutionnel rassurant pour les investisseurs de la diaspora autant que pour les autorités », confie-t-il à la sortie de l’audience, rappelant le caractère apolitique de la plateforme.
L’initiative s’appuie sur la fédération des associations congolaises de France, forte de dizaines de coopératives, d’incubateurs et de clubs académiques capables de mobiliser des expertises dans l’agro-industrie, le numérique, la santé ou la formation professionnelle.
La gouvernance inclusive plébiscitée
Le Conseil consultatif de la société civile, créé en 2021, a pour mandat de renforcer la participation citoyenne aux politiques publiques. En recevant Connect Diaspora, l’organe entend illustrer la volonté de l’exécutif de bâtir une gouvernance inclusive associant les Congolais du territoire et ceux de l’étranger.
« Les portes du dialogue restent ouvertes », souligne Germain Céphas Ewangui, rappelant que le pays a déjà mis en place une plateforme numérique consulaire qui recense plus de 120 000 ressortissants. L’intégration de Connect Diaspora dans cet écosystème devrait fluidifier les circuits administratifs.
Focus sur l’outil Connect Diaspora
Techniquement, le programme repose sur une application mobile reliée à un guichet unique implanté à Brazzaville. Les membres peuvent déclarer un projet, obtenir une évaluation technico-économique, puis accéder, si nécessaire, à des co-financements publics ou privés ainsi qu’à un accompagnement juridique spécialisé.
Un tableau de bord en temps réel permettra aux porteurs et à l’administration de suivre les indicateurs de performance : création d’emplois, contribution fiscale, balance des paiements. Des cartes interactives géolocaliseront les investissements, rendant visibles les pôles d’attraction prioritaires sur tout le territoire.
Sur le plan sécuritaire, un protocole avec l’Agence nationale de cybersécurité garantit la protection des données personnelles. Les transactions financières seront traitées via la plateforme monétique nationale certifiée PCI-DSS, réduisant les risques de fraude et renforçant la confiance des usagers et des partenaires bancaires.
Scénarios : quelles retombées ?
Selon une note de l’Institut national de la statistique, un investissement de dix millions d’euros rapatrié par la diaspora pourrait générer plus de 600 emplois directs dans l’agro-transformation. Avec l’effet multiplicateur, l’impact sur le PIB serait proche de 0,3 % en trois ans selon l’étude.
À moyen terme, le ministère des Finances envisage de structurer un emprunt obligataire dédié aux expatriés à des conditions préférentielles. Le scénario bas estime une mobilisation de 150 millions d’euros, de quoi financer des infrastructures de base sans alourdir la dette souveraine du pays.
Si l’expérience réussit, d’autres États de la CEMAC pourraient s’en inspirer. Des discussions informelles ont déjà eu lieu avec le Cameroun et le Gabon lors du Sommet des diasporas africaines organisé à Paris, témoignent des membres du FORIM présents à l’événement récemment.
Le secteur privé suit la dynamique. La Chambre de commerce de Pointe-Noire envisage de nouer un partenariat avec plusieurs clusters français pour coproduire des pièces mécaniques destinées aux industries pétrolières. Un tel rapprochement pourrait substituer jusqu’à 15 % des importations actuelles sur le segment offshore.
Et après ? Les chantiers ouverts
Pour consolider la démarche, un comité de pilotage tripartite – autorités, société civile et diaspora – sera installé avant la fin du premier trimestre, avec un mandat clair : élaborer une charte de performance et un code éthique régissant les interventions des partenaires sur le terrain.
L’enjeu est aussi culturel : renforcer le sentiment d’appartenance des jeunes nés hors du pays. Un festival annuel de l’innovation, porté par Connect Diaspora, pourrait alterner entre Pointe-Noire et Paris, mêlant hackathons, concerts et expositions sur les réussites entrepreneuriales de la diaspora congolaise dynamique mondiale.
Enfin, une étude d’impact indépendante sera lancée après douze mois pour mesurer la création d’emplois, la mobilisation fiscale et l’effet sur la balance des paiements. Les conclusions guideront l’intégration définitive du programme dans la Stratégie nationale de développement du Congo.
Dans la perspective du prochain Sommet Afrique-France, prévu l’an prochain à Paris, les promoteurs souhaitent présenter un premier bilan tangible. Un stand dédié au Congo-Brazzaville mettra en avant les réussites issues de Connect Diaspora et les ambitions pour la décennie 2025-2035 à venir.
