Impulsion créative et enjeu patrimonial
Au cœur de la capitale économique congolaise, la présentation de Lissolo 2.0 a confirmé la vitalité d’un secteur créatif que les autorités entendent placer au rang des vecteurs stratégiques de diversification. Conçu par le studio KB Publishing, le jeu s’inscrit dans la droite ligne des orientations présidentielles en faveur d’une économie de la connaissance susceptible de valoriser les identités locales tout en créant des opportunités d’emploi qualifié. « Jouer à Lissolo, c’est voyager à travers la richesse de nos départements », a rappelé son chef de projet, Hugues Wilson, devant un parterre de journalistes et de responsables municipaux. Lissolo — littéralement « récit » en langue lari — se veut ainsi un miroir ludique du patrimoine matériel et immatériel national, s’appuyant sur une démarche scientifique qui a mobilisé professeurs, chercheurs et entrepreneurs culturels durant deux années de développement.
Un outil pédagogique au service de la cohésion nationale
Dotée de 1 200 questions réparties sur sept thématiques, la nouvelle mouture intègre, fait notable, une dimension numérique à même de séduire une jeunesse de plus en plus connectée. Sur son plateau inspiré du Ludo, chaque déplacement devient prétexte à découvrir une sculpture téké, une essence forestière rare ou la trajectoire d’une entrepreneure de Brazzaville. La vocation intergénérationnelle du jeu répond à l’objectif, souvent réaffirmé par le ministère de l’Enseignement primaire et secondaire, de renforcer la transmission des savoirs endogènes au sein du cercle familial. Divine Malonga, en charge de la stratégie commerciale, insiste sur « l’alliance entre divertissement et rigueur pédagogique qui contribue à forger un sentiment d’appartenance partagé ». La présence, lors du lancement, du conseiller socioculturel du maire de Pointe-Noire, Philippe Mboumba Madiela, témoigne de l’intérêt institutionnel pour les initiatives susceptibles de consolider la cohésion nationale autour d’outils non formels.
Lissolo 2.0 : instrument émergent de la diplomatie culturelle congolaise
Dans un environnement international où les jeux de société deviennent des ambassadeurs de soft power, Lissolo 2.0 offre au Congo-Brazzaville une vitrine inédite. Les diplomates en poste soulignent volontiers que la mise en récit du patrimoine par la ludo-éducation peut renforcer l’attractivité du pays auprès des partenaires étrangers, à l’heure où Brazzaville fait valoir ses succès en matière de protection des forêts du Bassin du Congo ou encore de promotion des industries créatives. L’intégration d’un module sur les technologies numériques reflète l’ambition gouvernementale d’accompagner la transition digitale, à l’instar du plan national « Congo Digital 2025 ». En valorisant l’image d’un Congo innovant et conscient de ses racines, le jeu complète la palette d’instruments mobilisés par les chancelleries pour rendre compte d’une stabilité politique propice à l’investissement culturel.
Perspectives panafricaines et accompagnement institutionnel
La stratégie de KB Publishing ne se limite pas au marché national. Les déclinaisons en cours — Lissolo Teranga pour le Sénégal, Lissolo Ivoire pour la Côte d’Ivoire, et Lissolo Femina Africa axé sur l’égalité et le leadership — illustrent une projection continentale conforme aux objectifs de la Zone de libre-échange africaine. Cette expansion trouvera un terreau fertile si elle bénéficie, comme l’a rappelé la Chambre de commerce de Pointe-Noire, des mécanismes d’accompagnement déjà prévus par l’État pour les industries culturelles. Dans un contexte où les bailleurs multilatéraux s’intéressent de plus en plus aux projets articulant éducation, genre et numérique, Lissolo 2.0 apparaît comme un laboratoire grandeur nature. Son succès commercial et son appropriation par les établissements scolaires seront scrutés avec attention, tant il est vrai que la diplomatie contemporaine se nourrit aussi de ces récits ludiques capables de tisser des ponts entre les peuples.
