Un contexte socio-économique exigeant
Dans la capitale économique du Congo, la flambée mondiale des denrées et la lente reprise post-pandémie fragilisent encore les ménages à revenus modestes. Les filets sociaux nationaux existent, mais les sollicitations restent nombreuses et pressantes.
Les chiffres du Programme alimentaire mondial indiquent qu’un habitant sur trois s’inquiète de son prochain repas. Dans ce cadre, la société civile, les autorités locales et les partenaires privés cherchent des réponses coordonnées, évitant tout chevauchement et maximisant l’impact.
La Caritas se positionne en catalyseur
Sous l’impulsion de Mgr Abel Liluala, l’archevêque de Pointe-Noire, la Caritas diocésaine a démarré une distribution de vivres qui se répètera chaque trimestre. Plus de cent bénéficiaires inaugurent ce calendrier de solidarité.
L’abbé Steve Mayala, directeur de l’organisation, insiste sur la vocation inclusive de l’opération : les kits alimentaires sont remis « sans distinction, afin que chaque foyer vulnérable ressente la proximité de l’Église et de la nation ».
Un partenariat public-privé exemplaire
L’initiative bénéficie du concours logistique et financier de la Société nationale des pétroles du Congo ainsi que de sa fondation. Le choix n’est pas anodin : l’entreprise entend ancrer la responsabilité sociétale au cœur de son mandat économique.
Un responsable de la SNPC rappelle que « la sécurité humaine est le socle de la stabilité énergétique ». Cette logique renforce la perception d’un secteur extractif capable de soutenir l’équilibre social tout en générant des recettes pour le Trésor.
Sélection rigoureuse et chaîne d’approvisionnement
Les dix paroisses urbaines ont soumis des listes validées par les chefs de quartiers, évitant doublons et favoritismes. Cette codification augmente la transparence et rassure les bailleurs internationaux, souvent attentifs à la traçabilité des dons.
Les denrées — riz, huile, poisson salé, sel iodé et savon — proviennent en majorité de producteurs nationaux, ce qui soutient les circuits courts et limite les coûts de transport. Le port de Pointe-Noire, modernisé ces dernières années, facilite les flux.
Voix des bénéficiaires et retour d’expérience
Eveline Makosso, septuagénaire résidant au quartier Fond-Tié-Tié, affirme que les sacs de riz reçus « repoussent la peur de la faim ». Son témoignage, relayé par la radio diocésaine, confère une dimension humaine que les rapports statistiques ne captent pas.
Plusieurs bénéficiaires soulignent également le suivi psychosocial assuré par des volontaires formés. Cette approche globale, associant nutrition et écoute, réduit les risques de marginalisation et favorise la cohésion entre générations.
Effets multiplicateurs sur l’économie locale
À court terme, l’injection de denrées gratuites laisse davantage de liquidités aux familles, qui peuvent alors régler scolarité ou micro-assurance santé. L’impact, bien que modeste, crée un cercle vertueux au sein des marchés de proximité.
Les commerçants de Ngoyo rapportent déjà une lente progression des ventes non alimentaires, signe que l’aide alimentaire libère des dépenses différées. Un économiste de l’université Marien-Ngouabi évoque un « dividende social indirect, presque invisible mais mesurable dans la durée ».
Stabilité sociale et image internationale
Dans les chancelleries africaines, la régularité de telles opérations est perçue comme un indicateur de résilience institutionnelle. Elle atteste d’une articulation fluide entre Église, État et secteur privé, facteur souvent scruté par les partenaires techniques.
Un diplomate de l’Union européenne en poste à Brazzaville observe que cette coopération « renforce la crédibilité du Congo comme interlocuteur prévisible dans les forums sur la sécurité alimentaire ». L’argument pèse alors que se négocie la nouvelle architecture de financements climato-alimentaires.
Alignement avec la stratégie de développement national
Le Plan national de développement 2022-2026 consacre un pilier entier à la protection sociale. L’initiative de Pointe-Noire s’inscrit dans cet axe, en démontrant que des interventions ciblées peuvent être menées sans lourdeur administrative.
Le ministère des Affaires sociales envisage d’ailleurs un protocole d’échange de données avec Caritas, afin d’intégrer les résultats dans le prochain rapport de mise en œuvre remis aux partenaires multilatéraux.
Perspectives pour le deuxième trimestre
La prochaine distribution est annoncée pour septembre. Les organisateurs entendent porter le nombre de bénéficiaires à cent cinquante, en étendant la sélection aux zones semi-périphériques où la vulnérabilité reste sous-documentée.
Des négociations sont en cours avec un consortium de transporteurs locaux pour mutualiser la flotte et réduire l’empreinte carbone de la chaîne logistique, signe que la dimension environnementale n’est pas occultée.
Un modèle reproductible à l’échelle nationale
Brazzaville suit de près l’expérience de Pointe-Noire, y voyant un laboratoire de bonnes pratiques. L’objectif est de capitaliser sur les enseignements opérationnels pour déployer des actions similaires dans d’autres diocèses.
Plusieurs organisations confessionnelles, protestantes et musulmanes, se disent prêtes à adopter le protocole de sélection et de distribution, preuve que la solidarité ne connaît pas de cloisonnements religieux dans la République.
