Ce qu’il faut retenir
Réunis à Luanda, l’Union africaine et l’Union européenne ont relancé leur partenariat stratégique, en plaçant la paix, la prospérité et la mobilité humaine au cœur des priorités. Le Congo-Brazzaville, acteur stable d’Afrique centrale, soutient ce multilatéralisme rénové.
Le sommet, marqué par la participation active du ministre marocain Nizar Baraka et salué par les délégations d’Afrique centrale, ouvre une fenêtre d’opportunités pour les corridors économiques, les chantiers hydrauliques et la sécurisation des chaînes logistiques régionales.
Paix et prospérité au cœur du Sommet UA-UE
Placée sous le thème « Promouvoir la paix et la prospérité grâce à un multilatéralisme effectif », la rencontre de Luanda reprend les engagements pris à Bruxelles en 2022 et propose un suivi concret, financé par la nouvelle Facilité africaine pour la paix.
Les coprésidents ont insisté sur l’importance d’aligner les initiatives européennes Global Gateway et les plans d’industrialisation des États africains, afin d’accélérer la création d’emplois verts dans les ports atlantiques d’Afrique centrale.
Migrations et mobilité: le leadership marocain
La session consacrée aux citoyens a mis en avant le Pacte africain sur la migration, défendu depuis 2018 par le Roi Mohammed VI, Champion de l’UA pour la question. Les discussions ont porté sur la reconnaissance mutuelle des compétences et la simplification des visas d’affaires.
Brazzaville soutient cette approche, considérant la diaspora congolaise comme un relais d’investissements, notamment dans l’agro-industrie et le numérique. Selon le ministère congolais des Finances, les transferts de fonds ont atteint 120 millions de dollars en 2023, soit une hausse de 8 % sur un an.
La voix du Congo-Brazzaville à Luanda
Le ministre congolais des Affaires étrangères, Jean-Claude Gakosso, a rappelé dans son intervention que « la stabilité politique du Congo est un atout pour fédérer les corridors CEMAC autour de la diversification ». Ses propos ont recueilli un soutien manifeste au sein des délégations.
Le gouvernement de Denis Sassou Nguesso affiche une politique d’ouverture équilibrée : coopération sud-sud renforcée avec le Maroc et l’Angola, et dialogue constructif avec Bruxelles sur les financements climat destinés aux forêts du bassin du Congo.
Contexte régional
L’année a été marquée par des soubresauts politiques au Sahel et par des tensions dans la mer Rouge, rendant la sécurisation des routes atlantiques plus cruciale que jamais pour les exportateurs congolais de bois, de manganèse et de produits pétroliers.
Luanda offre, dans ce décor, un espace diplomatique où les États d’Afrique centrale peuvent présenter une position commune sur les infrastructures transfrontalières, telles que le pont route-rail Brazzaville-Kinshasa et le corridor de Lobito, soutenu par l’UE et les États-Unis.
Le point juridique/éco
Les experts ont disséqué la proposition de règlement européen sur la déforestation importée, qui exige une traçabilité stricte du bois entrant dans le marché européen. Le Congo, déjà certifié FLEGT pour plusieurs concessionnaires, y voit une opportunité de valoriser ses bonnes pratiques forestières.
Sur le plan financier, la Banque africaine de développement a présenté un guichet mixte de 500 millions de dollars pour soutenir les partenariats public-privé dans l’eau potable et l’irrigation. Brazzaville envisage d’y recourir pour accélérer le programme national Eau pour Tous.
Scénarios pour 2024-2026
Trois trajectoires se dessinent. La première, dite d’alignement, verrait l’UA et l’UE harmoniser leurs feuilles de route, permettant au Congo de capter des financements concessionnels massifs pour l’énergie solaire et la fibre optique.
La seconde, qualifiée de fragmentation, émergerait si les rivalités géopolitiques se durcissaient, diluant les efforts communs et reportant la mutualisation des centres de données en Afrique centrale.
Enfin, un scénario intermédiaire table sur des coalitions sectorielles flexibles, comme l’Alliance pour les batteries vertes portée par la RDC et la Zambie, auxquelles le Congo pourrait s’agréger pour diversifier sa production minière.
Et après ?
Les délégations se sont accordées pour installer un mécanisme de suivi semestriel. Brazzaville a proposé d’accueillir, dès l’année prochaine, un forum dédié aux corridors énergétiques du golfe de Guinée, en collaboration avec la Commission de l’UA.
Sur le terrain, les premiers test-pilotes du visa régional CEMAC-Maroc devraient démarrer fin 2024, facilitant les échanges universitaires et les stages industriels. Les start-ups congolaises du numérique espèrent ainsi élargir leurs marchés vers Casablanca et Tanger.
En réaffirmant sa confiance dans le multilatéralisme, le Congo-Brazzaville se positionne comme un médiateur pragmatique entre les ambitions panafricaines et les offres européennes. Le Sommet de Luanda aura surtout montré que la cohérence régionale et l’anticipation stratégique restent les vraies clés d’une prospérité partagée.
