Ce qu’il faut retenir
Brazzaville accueille du 6 au 8 octobre 2025 la 2ᵉ édition du Women Economic Forum. Porté par la Chambre Nationale des Femmes Cheffes d’Entreprises et Entrepreneures du Congo, l’événement vise à lever les freins à l’inclusion financière qui entravent encore l’essor de nombreuses dirigeantes.
La présidente fondatrice, Flavie Lombo, entend réunir artisanes, commerçantes, start-upeuses et cheffes d’entreprise autour d’un même objectif : transformer leur potentiel en croissance concrète. Sa méthode : mutualiser les expériences, formuler des recommandations fondées sur la réalité du terrain et hisser ces voix au sein des institutions financières.
Brazzaville s’apprête à vibrer au féminin
Le forum se tiendra aux tours jumelles, symbole d’ouverture économique de la capitale. Plus de quatre cents participantes sont attendues, épaulées par des expertes comme Blanche Ikogne, Eurydice Makaya-Ifoundé Daho et Vanessa Kimbouala, ainsi que l’entrepreneur congolais de RDC Alexis Indengué.
Le thème « Inclusion financière » sert de fil rouge aux trois journées. Tables rondes, masterclasses et consultations individuelles y sont programmées afin d’aborder la bancarisation, l’accès au crédit numérique et la sécurisation juridique des activités, enjeux identifiés lors de la première édition en 2023.
L’enjeu de l’inclusion financière
Selon la Banque mondiale, seuls 27 % des adultes congolais disposent d’un compte bancaire. Le taux chute encore quand il s’agit de femmes rurales. Pour Flavie Lombo, cette donnée confirme l’urgence de créer « une véritable chaîne de valeur au féminin ».
Les organisatrices souhaitent donc transformer le forum en caisse de résonance. Les recommandations finales seront mises à disposition du ministère des PME et du secteur bancaire, avec l’ambition de voir apparaître des produits financiers réellement adaptés à la taille comme au cycle d’activité des entrepreneures.
Genius, un accélérateur sur mesure
Grande nouveauté : le programme Genius. Conçu comme un incubateur mobile, il propose un accompagnement sur trois volets : éducation financière, formalisation juridique et bien-être cognitif. « Nous voulons préparer chaque promotrice à discuter d’égal à égal avec un conseiller bancaire », insiste Flavie Lombo.
L’équipe pédagogique s’appuie sur des coachs locaux et sur l’expertise d’institutions régionales. L’objectif est d’embarquer cent projets la première année, puis de doubler chaque année suivante, créant un effet démultiplicateur dans les zones urbaines et périurbaines.
En parallèle, un atelier cartographique permettra d’identifier les corridors commerciaux potentiels autour de Brazzaville et Pointe-Noire, afin de connecter plus rapidement les bénéficiaires aux marchés sous-régionaux.
Les banques, partenaires attendus
Le forum lance un appel clair aux établissements financiers : alléger les exigences de garanties et diversifier les instruments de financement. « La bancarisation de ces femmes sera un levier durable de croissance », souligne la présidente, saluant l’ouverture déjà manifestée par plusieurs banques locales.
Des dispositifs, comme les comptes d’épargne groupés ou les crédits rotatifs, sont évoqués pour s’adapter aux réalités du commerce de proximité. Des taux préférentiels pourraient être négociés en contrepartie d’efforts de formalisation et de suivi par le programme Genius.
Contexte, du local au continental
La stratégie s’inscrit dans l’Agenda 2063 de l’Union africaine, qui mise sur l’autonomisation économique des femmes pour atteindre une croissance inclusive. Au niveau national, les autorités ont déjà instauré des guichets dédiés aux PME féminines au sein du Fonds d’appui à l’employabilité.
Les organisatrices entendent profiter de cette dynamique. Les échanges du forum seront relayés sur la plateforme numérique de la Chambre, permettant aux entrepreneures de suivre les sessions en direct depuis Owando ou Dolisie et de poser leurs questions via un chatbot dédié.
Scénarios pour les trois prochains ans
Scénario optimiste : l’adoption rapide des recommandations pourrait porter le taux de bancarisation féminine à 40 % en 2028, selon les projections internes. Cela représenterait environ 200 000 nouvelles clientes pour les banques congolaises.
Scénario prudent : sans engagement formel des partenaires financiers, l’impact se limiterait à la dizaine d’entreprises incubées, freinant l’essaimage des bonnes pratiques. Les organisatrices misent donc sur un suivi trimestriel pour maintenir la pression positive sur l’écosystème.
Et après ? Cap sur l’export
Au-delà de 2025, Flavie Lombo veut transformer le forum en hub itinérant, capable de se délocaliser dans les villes secondaires. Une édition mobile soutenue par la CEMAC ouvrirait la porte à des partenariats transfrontaliers avec le Cameroun ou le Gabon.
À terme, la Chambre nationale envisage de publier un indice de performance de l’entrepreneuriat féminin, alimenté par les données recueillies via Genius. Un outil qui guidera investisseurs, décideurs publics et bailleurs internationaux dans la structuration de nouvelles chaînes de valeur régionales.